Questions-réponses au sujet de l’opération de destruction d’ivoire
Questions-réponses au sujet de l’opération de destruction d’ivoire
28 novembre 2023
Pourquoi détruire de l’ivoire ?
Pourquoi organiser cette opération de destruction d'ivoire ?
Le commerce de l'ivoire demeure une menace importante pour les populations d'éléphants actuelles. Les éléphants sont victimes du braconnage pour répondre à une demande en ivoire insatiable. Les marchés légaux existants permettent de blanchir l’ivoire illégal [provenant d’éléphants braconnés] fournissant ainsi une couverture au développement du commerce illicite. Il est impossible pour les forces de l'ordre de distinguer aisément l'ivoire légal de l'ivoire illégal.
Chaque morceau d'ivoire provient d’un éléphant mort. Cette opération a été organisée pour contribuer à protéger les derniers éléphants de la planète en retirant le plus d'ivoire possible du marché. Elle pousse également à la réflexion et incite les particuliers à se dessaisir de leurs objets en ivoire à des fins de destruction.
Que dit la loi au sujet du commerce de l’ivoire ?
Ces dernières années, les législations française et européenne ont connu beaucoup d’évolutions restreignant encore plus le commerce d’ivoire. En effet, aujourd’hui, le commerce est très limité : toute vente d’ivoire brute est interdite en France. Pour certains objets travaillés concernés par les dérogations possibles, il est nécessaire de posséder un certificat CIC [1] avant toute vente, peu importe l’âge de l’objet en question. Néanmoins, il faut désormais surveiller la bonne application de ces nouvelles mesures en vigueur depuis janvier 2022. En effet, le commerce d’ivoire perdure en France principalement via le commerce d'antiquités et la vente sur Internet. Lors d’une intervention en fin d’année 2022, l’OFB avait saisi 97 objets issus d’espèces protégées y compris d’éléphants, lors d’une brocante de Noël à Micropolis. Les documents prouvant leur légalité les accompagnent rarement.
Pourquoi IFAW participe à l’organisation de cette destruction, quel est son rôle ?
La campagne d’IFAW « Je donne mon ivoire » est née en 2015, lorsqu‘IFAW a constaté l’importance de proposer une solution aux personnes souhaitant se débarrasser de leurs objets en ivoire. Depuis, cette opération a pris de l’ampleur car les français sont demandeurs d’une solution pour se dessaisir de leurs objets en ivoire (soit par conviction éthique ou faute de pouvoir le vendre légalement). Avec cette opération de destruction, IFAW souhaite ouvrir la voie à une réflexion avec le gouvernement français pour trouver une solution à long terme pour la prise en charge de ces objets.
Cette opération est co-organisée avec l’Office français de la biodiversité (OFB), avec le soutien du Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, du Commandement pour l’environnement et la santé (CESAN), de la Douane, du Ministère de la Justice et du Comité français de l’UICN.
Concrètement comment l’opération se déroulera-t-elle ?
Une destruction d’ivoire est organisée fin novembre. Les objets en ivoire de particuliers en ayant fait don ainsi que des stocks d’ivoire saisis ces dernières années par l’OFB, les douanes et la Justice seront détruits. En amont, ces objets seront stockés de façon sécurisée et ensuite transportés dans le lieu de destruction. La destruction sera par broyage (concassage) puis incinération. La destruction sera documentée et suivie par un huissier.
Pour chaque kilo d’ivoire collecté par IFAW, l’association s’engage, avec son partenaire Wild is Life, à planter un arbre indigène tels que les acacias et les baobabs afin de contribuer à la restauration de certains habitats des populations d’éléphants au sein des Forêts Panda Masuie et Fuller au Zimbabwe.
Ces arbres seront plantés courant fin 2023 début 2024 car il s’agit de la meilleure période.
Cette action de plantation permettant de restaurer une partie de l’habitat des éléphants au Zimbabwe renforce la symbolique des dons d’ivoire des particuliers participants à l’opération.
L'opération de destruction d’ivoire ne va-t-elle pas augmenter la demande et faire monter le prix de l'ivoire en réduisant la quantité disponible sur le marché ?
Non. La demande en ivoire est alimentée par les classes moyennes de plus en plus nombreuses, essentiellement en Asie, qui achètent de l'ivoire pour exprimer leur statut social. L'argument selon lequel la disponibilité de l'ivoire réduirait la demande s'est avéré désastreux, comme on l'a vu lorsque la vente de stocks d'ivoire organisée pour inonder le marché a été suivie d'une explosion du braconnage. La triste vérité est là : la demande en ivoire encourage le braconnage d'environ 10 000 éléphants chaque année.
Détruire l’ivoire provoque l’asséchement des marchés et l’effondrement du prix de l’ivoire. Attribuer une valeur marchande à l’ivoire, c’est tuer les éléphants. Empêcher l’attribution d’une valeur à l’ivoire, c’est sauver les éléphants. Les personnes qui remettent leurs objets en ivoire aux autorités protègent, par ce geste, les éléphants en refusant de mettre leur ivoire sur le marché et de stimuler encore la demande.
Lorsque nous arrêtons de considérer l’ivoire comme un bien avec une valeur marchande, le braconnage s’arrête. C’est la seule manière d’y arriver.
Pourquoi IFAW détruit-il de l'ivoire au lieu de laisser le gouvernement français s'en occuper ?
Le gouvernement français s'est engagé à détruire régulièrement tout ivoire illicite saisi (d'après le Plan national d’actions pour lutter contre le braconnage des éléphants et contre le trafic d’ivoire et d’autres espèces protégées de 2014), à l'exception d'une petite quantité conservée pour la formation du personnel de lutte contre la fraude. Bien qu'IFAW salue cette approche, nos sources indiquent qu'en réalité, les responsables des forces de l’ordre sont confrontés à de nombreux défis pour le mettre en œuvre. IFAW encourage le gouvernement français à suivre cette approche et offre son soutien si nécessaire. IFAW encourage également les gouvernements étrangers à suivre l'exemple de la France. IFAW détruit l'ivoire cédé par des particuliers pour montrer que l'opinion publique soutient largement la protection des éléphants et se positionne contre le commerce de l'ivoire, et pour attirer l'attention sur l'exemple donné par le gouvernement français dans la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages au niveau mondial. Cette destruction permettra également d'empêcher toute exploitation ultérieure d'objets en ivoire venant de l’hexagone.
Par ailleurs cette action, par l’ampleur de l’ivoire cédé, vise à démontrer la nécessité pour que le gouvernement français fournisse une solution aux personnes qui souhaitent se débarrasser de leurs objets en ivoire. La mise en place d’un système à long terme pour la prise en charge et destruction de ses objets cédés est nécessaire. C’est notamment le cas dans d’autres pays en Europe comme en Belgique et aux Pays-Bas.
Pourquoi ne pas peindre les défenses des éléphants pour éviter qu'ils ne soient braconnés pour leur ivoire ?
1/3 de la longueur de la défense est insérée à l'intérieur de leurs crânes, ce qui signifie que même si leurs défenses étaient peintes, elles seraient toujours une cible pour les braconniers. De plus, on ne sait pas si la peinture a un impact sur ces animaux : elle pourrait être toxique à cause des fixateurs permanents de pigments. Nous ne savons pas comment les animaux se percevraient avec des défenses colorées. Cela pourrait entraîner des changements importants de comportements. Enfin, une telle procédure est extrêmement complexe et coûteuse.
Pourquoi ne pas simplement retirer les cornes des rhinocéros et les défenses des éléphants ?
Ce n'est malheureusement pas aussi simple. En plus du risque lié à l'anesthésie et à la capacité de la corne à se régénérer, ôter l'ivoire d'un animal vivant ne le protégera pas du braconnage.
Des recherches sur le terrain montrent que retirer les cornes des rhinocéros n'arrête pas les braconniers qui les attaquent quand même, car il n'est pas possible de couper assez près de la couche germinale sans risquer de provoquer des malformations lors de la repousse, des infections voire leur mort. Les braconniers peuvent donc continuer à s'en prendre aux animaux pour le minuscule moignon de corne qui reste.
Pour les éléphants, il n'est pas possible de retirer les défenses, car elles font partie de la structure osseuse du crâne. C'est pour cela que les braconniers sont obligés de les tuer pour prélever leur ivoire. Les raccourcir pose également un problème sur le plan logistique. Et même si seulement 7 à 10 % de la défense est laissée, cela représente déjà beaucoup d'argent sur le marché noir.
De plus, si les éléphants ont des défenses et les rhinocéros, des cornes, ce n'est pas sans raison. Ils en ont besoin pour vivre normalement.
Les défenses servent aux éléphants à se défendre contre leurs congénères et contre les prédateurs, à soulever différentes choses, à rassembler de la nourriture ou à retirer l'écorce des arbres. En période de sécheresse, elles sont utiles pour creuser des trous d'eau dans les rivières asséchées.
La meilleure solution est d'amener les gouvernements à considérer le braconnage comme un crime et ainsi mettre en place tous les moyens nécessaires pour arrêter les criminels et appliquer des sanctions dissuasives. IFAW travaille avec plusieurs agences de lutte contre la fraude dans les régions touchées par ce problème pour renforcer les capacités techniques et opérationnelles de lutte contre le braconnage et le commerce illégal. Dans de nombreux cas, il y a un manque de coopération régionale ; c'est pourquoi IFAW travaille avec des agences de lutte contre la fraude telles qu'INTERPOL pour renforcer leurs capacités et leur coopération.
Pourquoi détruisez-vous l'ivoire puisque l'éléphant est déjà mort de toute façon ? Pourquoi ne pas plutôt vendre les objets en ivoire pour obtenir des fonds pour protéger les éléphants ?
La destruction des objets en ivoire est une action importante qui envoie un message fort selon lequel l'ivoire n'a aucune valeur intrinsèque (sauf pour les éléphants). Elle empêche également que cet ivoire soit réintroduit sur le marché car l'existence même de marchés légaux de l'ivoire stimule la demande de ce produit et ainsi le braconnage.
Compte tenu des nombreux massacres d'éléphants qui ont lieu actuellement, tout commerce de l’ivoire, même légal, constitue une menace pour les éléphants. Des tonnes d'ivoire illicite sont saisies chaque année et le commerce légal de l'ivoire continue d'alimenter un marché qui couvre le blanchiment illicite de l'ivoire. Il est crucial de fermer toutes les vannes d'approvisionnement de ces marchés pour la survie des éléphants.
Certains de ces objets sont de grande valeur artistique et patrimoniale, n’est-il pas dommage de procéder à leur destruction au lieu de les sauvegarder ?
Les musées en France, sont en général peu demandeurs de recevoir ce type d’objets, car les collections des musées en regorgent déjà. Ceci dit, afin de s’assurer que cette opération de destruction ne comprend pas des objets dits de « haute importance, culturelle, artistique ou historique », conforme aux recommandations relatives aux dernières restrictions sur le commerce d’ivoire au sein de l’Union européenne en vigueur depuis janvier 2022, une évaluation sera effectuée par un expert indépendant. Si des objets sont identifiés leur placement dans un musée devra être garanti pour ne pas être détruit. Dans le cas peu probable que des objets soient concernés, ils profiteraient d’une dérogation à la destruction.
Je souhaite me débarrasser de l’ivoire que j’ai chez moi, comment faire ?
IFAW ne peut plus recevoir d’ivoire à des fins de destruction mais continuera à travailler avec les autorités pour qu’elles prennent le relais. Nous espérons vivement que le gouvernement relèvera le défi de la mise en place d’un système de collecte pérenne.
IFAW et le commerce d'ivoire antique
IFAW tire la sonnette d’alarme concernant le commerce d’ivoire dit « antique ». En effet, certaines personnes font passer de l'ivoire récent pour de l'ivoire antique afin de le vendre à des acheteurs ignorants.
Je vois de l'ivoire en vente dans une boutique ou sur Internet : comment savoir s'il s'agit d'ivoire licite ou illicite ?
En France, on peut vendre de l'ivoire travaillé ancien (c'est-à-dire datant d’avant 1947 et sculpté), mais seulement dans certaines conditions très restreintes. Les personnes qui vendent légalement de l'ivoire travaillé doivent disposer d'un certificat (CIC) visé à l’article 10 du règlement de l’UE, délivré par la DREAL (direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement) qui autorise de vendre légalement l'objet en question. Toute vente d'ivoire brut est désormais interdite.
Comment IFAW peut-il lutter contre l'usage traditionnel de l'ivoire qui existe depuis des centaines d'années, par exemple l'industrie de l'ivoire sculpté dans des pays comme la Chine et le Japon ?
Il existe bien d'autres possibilités pour les sculpteurs : le bois, la pierre, le jade, etc. Par ses campagnes, IFAW cherche à sensibiliser le public au destin tragique des éléphants en raison de la demande en ivoire sculpté et aux problèmes juridiques que pose cette pratique. IFAW travaille dans des pays asiatiques comme la Chine pour influencer l'opinion publique dans ce domaine. Depuis 2018, le commerce de l’ivoire est interdit en chine.
Que vont devenir les artisans professionnels de l’ivoire si le commerce d’ivoire est interdit ? La pratique artisanale de l’ivoire n’aura-t-elle pas vocation à disparaître ?
Ces artisans pourront effectuer une transition professionnelle et exercer leur talent sur d’autres matériaux que l’ivoire. Les musées ont suffisamment de collections d’ivoire (qui ont un statut spécifique) qui reflètent l’histoire de l’utilisation et de l’artisanat de l’ivoire.
Lorsque je suis en vacances ou que je fais des achats sur Internet, comment savoir si un objet est en ivoire ou en plastique ?
L'ivoire est plus cher que ses imitations en plastique. En cas de doute, n'achetez pas, même si le vendeur prétend qu'il s'agit d'ivoire légal ou antique.
Comment pouvez-vous affirmer qu'un objet est en ivoire et non en os ou en plastique ?
Il est très difficile de faire la différence entre de l'ivoire authentique et une imitation, ce qui explique pourquoi les touristes deviennent souvent involontairement la cible des marchands d'ivoire. La méthode éprouvée pour tester l'ivoire est le « test de l'aiguille chauffée ». Comme l'ivoire est virtuellement insensible à la chaleur, ce test n'endommagera pas l'objet s'il est authentique. S'il s'agit d'ivoire véritable, il dégagera l'odeur inimitable qu'on sent chez les dentistes : celle d'une dent brûlée. S'il sent le plastique brûlé, c'est du plastique.
L'os aussi est résistant à la chaleur, mais pas autant que l'ivoire. L'odeur est moins marquée (voire absente), et différente de celle de la dent qui brûle. La plupart des sculptures en os sont « capuchonnées » aux extrémités, puisque tous les os sont creux. Si un objet est sculpté assez finement pour tenir dans la paroi d'un os (généralement moins de 2 cm), il peut ressembler à de l'ivoire. Cependant, l'os est absolument dépourvu de grain et présente TOUJOURS de petites marques, parfois brunes, dans lesquelles se trouvait la moelle ou le sang.
Comment agir ?
Qu'est-ce qu'IFAW fait sur le terrain pour protéger les derniers éléphants de la planète ?
IFAW aide les éléphants :
- En soutenant les zones protégées où les éléphants et autres animaux sauvages peuvent se déplacer librement sans être menacés par le braconnage ;
- En développant son projet « Donnons de l’espace », visant à sécuriser les connexions entre les habitats dispersés des éléphants à travers l'Afrique australe et orientale afin de maintenir des populations d'éléphants en bonne santé.
- En déplaçant le cas échéant des éléphants vers des oasis de sécurité, loin des zones où ils entrent en conflit avec les populations et où ils sont menacés par le braconnage ;
- En finançant des rangers dans les parcs des États de l'aire de répartition des éléphants ainsi que des équipements, et en assurant des ateliers de formation pour les agences de lutte contre la fraude ;
- En travaillant étroitement avec INTERPOL, une agence de police internationale, qui s'attaque au commerce illicite d'ivoire ;
- En secourant des éléphants orphelins en Afrique et en Inde et en les relâchant dans la nature.
Existe-t-il de l'ivoire légal?
En France, l’ivoire d’éléphant ne peut pas en général être vendu légalement. Une exception sont les pièces d’ivoire travaillé datant d’avant 1947 et qui ont été légalement importées dans l’UE. En revanche, toute vente de tels spécimens nécessite un certificat spécifique délivré par l’administration CITES. Il existe encore des dérogations exceptionnelles qui concernent les instruments de musique.
Ramener de l’ivoire de l’Afrique ou de l’Asie n’est possible que dans des cas très exceptionnels (concernant principalement de l’ivoire ancien, les instruments de musique et seulement avec les autorisations nécessaires). Il est en effet illégal de vendre de l’ivoire récent.
Que peuvent faire les citoyens ?
Le grand public a aussi un rôle à jouer. Il doit savoir que les éléphants sont actuellement menacés de disparition. C’est pourquoi, il doit s’abstenir d’acheter de l’ivoire. Rapporter de l’ivoire comme souvenirs de vacances est totalement interdit. Chaque morceau d’ivoire provient d’un éléphant mort.
Que faut-il faire si je soupçonne/sais que l’ivoire en vente est illicite ?
Vous pouvez contacter l’Office français de la biodiversité (OFB). Elle dépend directement de la Direction de la Police de l’établissement et est en lien direct avec le Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Si vous voyez des produits sur des sites de vente en ligne comme eBay ou Leboncoin vous pouvez également les signaler directement auprès de ces plateformes via l’outil de notification du site et les signaler à IFAW ou l’OFB.
[1] Un certificat intra-communautaire visé à l’article 10 du règlement CE n°338/97
Contenu connexe
Communiqué de presse
Gardien IA 2.0 : un outil à la pointe de la technologie pour lutter contre la cybercriminalité faunique
En savoir plusCommuniqué de presse
Augmentation alarmante de la criminalité faunique dans toute l'Amérique hispanique
En savoir plusCommuniqué de presse
Vanda, Amani et Lira, 3 autres lionnes rescapées du conflit en Ukraine rejoignent la Belgique
En savoir plusSans vous, nous ne pouvons rien faire. Le moindre don peut nous aider à protéger les animaux. N’hésitez plus.