cartographie des menaces pesant sur les mammifères marins du Kenya
cartographie des menaces pesant sur les mammifères marins du Kenya
2 juin 2023
Dans les années 60, il était courant de voir de grands troupeaux de dugongs de plus de 100 individus dans les eaux côtières du Kenya. Mais les avions qui ont survolé la côte pendant six jours en mars dernier pour effectuer le premier recensement marin de la région depuis 30 ans n’ont détecté que deux de ces créatures dodues et mangeuses d’herbes marines.
Les résultats complets du recensement seront publiés dans les semaines à venir, mais on sait déjà que les menaces qui pèsent sur les principales espèces marines des eaux côtières du Kenya, comme les dugongs, occuperont le devant de la scène. Le rapport permettra d’identifier les zones clés où des efforts de conservation décisifs sont nécessaires.
« L’objectif de ce recensement était de déterminer l’état de conservation de la mégafaune marine du Kenya, en particulier des dugongs, des tortues marines, des requins-baleines, des dauphins à bosse et d’autres espèces », explique le Dr Mohamed Omar, responsable scientifique au Centre de recherche marine et côtière du Wildlife Research and Training Institute (WRTI), à Mombasa, au Kenya. « Nous avons également cherché à identifier et à cartographier les menaces qui pèsent sur leur survie dans nos eaux, afin de pouvoir élaborer des stratégies de gestion appropriées et rectificatives aux niveaux régional et national. »
Lillian Mulupi, responsable du programme de Conservation marine chez IFAW en Afrique de l’Est, explique qu’en plus d’enrichir la recherche marine et de déterminer où des efforts de conservation essentiels sont nécessaires, « le recensement permettra également d’améliorer les moyens de subsistance des populations locales en générant des données pour le développement d’activités de tourisme durable ».
repérer les animaux sous-marins à partir d’un avion
Ce recensement, réalisé à l’aide de quatre avions et d’une équipe de 50 personnes composée de pilotes, techniciens aéronautiques, observateurs et spécialistes du milieu marin, a été rendu possible grâce à un financement d’IFAW. En collaboration avec des spécialistes du Kenya Wildlife Service, du WRTI, du Olive Ridley Project, de la Wildlife Conservation Society et de la Watamu Marine Association, il a couvert l’ensemble de la côte kenyane, de la frontière entre le Kenya et la Tanzanie, au sud, à la frontière entre le Kenya et la Somalie, au nord.
Les avions, transportant chacun trois observateurs munis d’un dictaphone et d’un GPS portable permettant de localiser les espèces observées, ont fait des allers-retours à 2 ou 3 kilomètres de distance dans la zone, qui avait été divisée en blocs. Les blocs permettent un comptage systématique.
En plus de noter les comportements des espèces, tels que l’alimentation, le jeu ou l’accouplement, les observateurs enregistrent la densité du trafic maritime et l’intensité de la pêche et des activités portuaires.
la mégafaune marine confrontée à de graves menaces
Selon le Dr Omar, la mégafaune marine côtière est menacée au niveau mondial par l’exploitation, les prises accessoires des navires de pêche, les effets indirects de la pêche sur l’écosystème et les activités touristiques non réglementées. D’autres menaces résultent de la prospection et de l’extraction d’hydrocarbures, de la détérioration de la qualité de l’eau, des effets du changement climatique et du développement côtier non durable.
Les eaux côtières du Kenya ne sont pas épargnées par ces menaces, qui ravagent les écosystèmes marins et réduisent les habitats.
Les mammifères marins sont très sensibles aux bruits sous-marins parce qu’ils communiquent en appelant. C’est également dans ces eaux côtières qu’ils se reproduisent. Le bruit et les activités humaines non réglementées dans les habitats critiques peuvent donc perturber considérablement leur bien-être.
Les filets de pêche abandonnés ou perdus en mer sont également mortels car ils piègent et noient les tortues marines, les baleines et les dugongs qui ont besoin de respirer à la surface. Les observateurs ont donc été chargés de repérer aussi ce type de phénomène, ajoute Lillian Mulupi. »
La raison du déclin brutal de ces animaux est difficile à déterminer. « Le déclin du nombre de dugongs pourrait suggérer que quelque chose dans les eaux côtières perturbe leur reproduction ou que les espèces d’herbes marines dont ils se nourrissent ne sont plus disponibles. Cette situation peut être due à la perte d’habitat, à la pollution ou au changement climatique, explique Lillian Mulupi. »
Parmi les autres menaces, on peut citer l’impact des dispositifs et des techniques de pêche inappropriés qui détruisent les coraux et les herbiers marins.
IFAW prévoit de soutenir un deuxième recensement aérien de la mégafaune marine dans le courant de l’année. Les données produites par ces deux recensements constitueront un outil important pour les gestionnaires de la conservation et les décideurs politiques au Kenya.
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